mardi 9 avril 2019

Mon père, ce héro

Aujourd’hui nous sommes le 9 avril. 


Aujourd’hui c’est l’anniversaire de mon père.


Aujourd’hui il y a 4 ans j’apprenais, en l’appelant pour lui souhaiter ses 65 ans, qu’il sortait de chez le spécialiste et qu’il avait un cancer de l’œsophage.


Aujourd’hui il y a 4 ans je découvrais ce cancer et comprenais qu’il faisait partie de ceux qu’on ne savait pas encore soigner.



Aujourd’hui il y a 4 ans je prenais conscience que ça n’arrivait pas qu’aux autres. J’avais été relativement protégée jusque-là et ça m’arrivait dans la gueule par une des personnes que j’aimais le plus.


Aujourd’hui 2 ans après son décès j’ai du mal à ne pas prendre mon téléphone pour l’appeler et lui souhaiter un bon anniversaire dès le petit déjeuner.


Bref, j’ai perdu mon père il y a 2 ans et la douleur est encore vive.


C’est incroyable comme des jours marquent plus notre esprit que d’autre.


Il y a 4 ans j’étais en déplacement professionnel à Bellegarde. Je n’y avais jamais mis les pieds et n’y suis jamais retournée depuis pourtant je saurai exactement vous redire où j’étais dans la ville quand j’ai passé mon appel enjoué pour lui pousser la chansonnette pour son anniversaire.
Quand il m’a expliqué son RDV j’ai eu le sentiment que mon monde s’écroulait : il devait commencer au plus vite la chimio et les rayons. 



Mon premier réflexe a été de regarder sur Doctolib et toutes les pages internet traitant du sujet. Evidemment les statistiques de guérison et d’espérance de vie ne jouait pas en notre faveur.


Le deuxième a été d’appeler une de mes poulettes qui m’a interdit de continuer à consulter le web. Elle savait qu’on se torturait assez le cerveau naturellement, sans prendre en plus les informations plus ou moins exactes trouver sur la toile. Elle était passée par là. Aujourd’hui encore je me demande pourquoi c’est elle que j’ai appelé. Elle avait vécu la même chose, le même cancer, une fin douloureuse. Aujourd’hui je m’en veux de l’avoir replongé dedans sans filtre avec ma tristesse mais je n’ai pas réfléchi. Elle m’a un jour dit que ça lui avait permis de se rendre compte qu’elle n’avait pas fini son deuil et d’avancer. Je ne saurai jamais si elle m’a dit ça pour ne pas me culpabiliser d’avantage (elles sont sympas mes poulettes) ou si c’était vrai.


Pendant presque 2 ans ma vie a été rythmée par des aller-retours au moins toutes les 2 semaines à Nantes pour le voir le plus possible. J’ai eu la chance à cette époque de travailler pour une société dont l’usine était basée à Nantes, ce qui me permettait d’aller lui faire des coucous en semaine quand je passais dans le secteur. C’était épuisant car ça s’ajoutait à mes déplacements professionnels habituels mais je ne pouvais pas me plaindre, je pouvais passer du temps avec lui et surtout lui ne s’est jamais plaint : surprenant quand on sait que lorsqu’il avait un rhume il était à l’agonie. Là il avait un cancer et nous ne l’avons jamais entendu malgré les traitements lourds et leurs conséquences : 
  • Les brûlures dues aux rayons qu’aucun médicament n’a pu apaiser. Seule une conjureuse / guérisseuse a réussi ce miracle. Pour un esprit scientifique et cartésien comme le sien autant vous dire que ça a été difficile à accepter
  • Les effets secondaires liés à la chimio avec une perte de la sensibilité au niveau des mains et des pieds, difficile pour continuer à avoir une vie normale
  • Un traitement expérimental qu’il a vraiment souhaité essayer car avec de bons résultats sur les cancers du sein et sur lequel il avait mis beaucoup (trop) d’espoir.
  • Les hospitalisations…

Début octobre 2016, j’étais à Biarritz pour un congrès, ma mère m'a téléphoné à 4h30 du matin pour me dire que c’était la fin. Elle venait d’être appelée par l’hôpital, il était tombé dans le coma. Il fallait que je puisse rentrer au plus vite pour essayer de lui dire au revoir. Biarritz/Nantes ce n’est pas la porte à côté. Je me rappellerai aussi très bien ce jour : attendre devant l’aéroport l’ouverture des portes, sauter dans le 1er avion pour Lyon pour ensuite avoir un avion pour Nantes, courir dans un taxi qui a très vite compris ce qui se passait quand je lui ai donné ma destination et qui a fait le maximum pour m’y amener au plus vite. L’infirmière qui m’attendait en bas pour ne pas perdre de temps dans l’hôpital. Celle qui m’a tenu la main car j’avais peur de rentrer seule dans la chambre. La visite du médecin pour nous dire qu’avant midi il serait probablement parti. Tenez-vous bien à 18h il s’est réveillé comme une fleur. Fatigué mais avec toute sa tête. Quelle volonté de vivre !


Le répit aura été de courte durée : 3 mois mais nous avons encore pu profiter de lui même s’il est resté hospitalisé car trop faible pour se lever. 3 mois qui m’ont aussi permis de me préparer : lors de ma dernière visite il m’a indirectement fait comprendre qu’il n’avait plus l’énergie de se battre. Le 20 janvier 2017 en début d’après-midi, ma mère arrivait à la maison de repos, et on lui a appris qu’il venait de partir dans son sommeil devant la TV. Le connaissant il devait être devant C News dépité devant l’investiture de Trump. Pour lui c’était une des pires choses qui pouvait arriver. J’aime à penser qu’il est parti avant qu’il ne prête serment car il ne voulait pas voir ça.


Ce jour-là mon monde s’écroulait et cette fois ce n’était pas un sentiment. J’ai fini en pleur dans les bras de mon boss qui a tout pris en charge : la réservation de mon train et le taxi pour me ramener chez moi prendre des affaires. Une poulette était là quand je suis arrivée pour m’aider à prendre mes affaires (elles sont vraiment trop gentilles hein ?).


3 choses m’ont marqué dans ma phase de deuil :
  • On a beau avoir l’impression d’être préparé, quand le décès arrive, finalement nous ne sommes jamais prêts
  • Plus de 2 ans après il me manque toujours autant. Je me demande si un jour je m’y ferai ou si j’aurai toujours ce sentiment de vide. C’est certain Je pleure beaucoup moins (et heureusement mes yeux me remercient !), je m’habitue à son absence mais des jours comme aujourd’hui sont plus difficiles que d’autres.
  • Je me suis rendue compte que je pensais tous les jours à mon père et plus généralement à mes parents. Avant ça, je pense que c’était déjà le cas mais je ne m’en rendais pas compte. Mais maintenant que Papa n’est plus là je marque toujours un temps d’arrêt quand une pensée vers eux me traverse l’esprit. Et quand on s’attarde sur ce genre de choses on se rend vite compte que les occasions de penser à eux sont nombreuses au quotidien : un souvenir, une odeur, une histoire entendue… Au départ ça a vraiment créé une sensation de vide. Maintenant je suis habituée il est une partie de moi et c’est souvent maintenant des anecdotes rigolotes qui refont surface. Et j’en profite pour appeler ou envoyer un SMS à ma mère !


Après ce qu’il a vécu je ne peux pas lui en vouloir d’être parti si tôt mais j’aurai toujours le regret qu’il ne connaisse jamais Mon Mec que j’ai rencontré 1 mois après… Et je suis sure que ces regrets seront toujours là quand des choses importantes m’arriveront. Mais j’essaye surtout de garder en tête les bons moments que j’ai eu la chance de vivre avec lui.


Aujourd’hui vous l’aurez compris, il me manque plus que d'habitude

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